Les réformes institutionnelles belges entraînent la régionalisation des bois et forêts en 1983. Dans le cas de la forêt de Soignes, son application crée des effets parfois surréalistes.
Un principe simple
Les limites régionales sont fixées selon l’appartenance linguistique officielle de la majorité des habitants de chaque commune belge, les 19 communes bruxelloises étant considérées comme bilingues. La forêt de Soignes chevauche donc les 3 Régions.
Les limites communales en Soignes ne sont tracées qu’en 1825 pour répartir entre les communes voisines de la forêt la part de l’impôt foncier dû par la Société Générale devenue propriétaire de Soignes trois ans plus tôt. Comme cette société la restitue à l’Etat en 1843 — après l’avoir amputée de plus de moitié… — ces limites communales en forêt perdent toute utilité, mais elles sont reportées de carte en carte depuis lors.
Une application acrobatique
Pour éviter toute discussion dans un contexte politique délicat, ces limites sont reprises en 1983 pour fixer les portions de la forêt revenant à chaque Région. Aucune ne dispose d’un bloc d’un seul tenant : un manque de continuité qui ne facilite pas la gestion… Comment faire respecter par exemple les réglementations flamande et wallonne imposant de tenir les chiens en laisse alors qu’en Région bruxelloise ils peuvent être lâchés à certaines conditions et que le maître, ignorant souvent les détails complexes des limites régionales, ne s’inquiète pas de savoir dans quelle Région il se balade ?
Des efforts de coordination
L’autonomie de chaque Région dans la gestion de ses morceaux de forêt complexifie par exemple la gestion des cours d’eau franchissant les limites régionales ou des accès à la forêt.
Aussi, en 2008, les trois Régions souscrivent-elles à un « schéma de structure » préparant par exemple une répartition coordonnée des parcs de stationnement accueillant les promeneurs motorisés ou l’unification maximale de la signalétique placée le long des chemins.
Au-delà de ces options officielles, les gestionnaires des trois Régions s’efforcent de maintenir le maximum de concertation. Par exemple, pour marquer l’Année internationale de la Forêt, ils organisent conjointement un colloque sur la forêt de Soignes au Palais des Académies en novembre prochain.
Les bons côtés de cette « biodiversité » administrative
Dispositif de mise à sec (sécheresse) d'un champ d'expérimentation (ULB)
Son autonomie permet à chaque Région de se lancer dans des expériences originales, potentiellement utiles à ses voisines, par exemple pour créer et gérer des réserves en forêt. C’est l’avenir qui tranchera entre les effets négatifs et bénéfiques de l’application de la régionalisation à la forêt de Soignes.